Se perdre dans l'épiderme noueux, distorsion lanière tégument cellulosique. Aux doigts, relief boursouflure, proéminences, égratignent et imprime frisonnement tactile.
Se perdre dans l'épiderme noueux, distorsion lanière tégument cellulosique. Aux doigts, relief boursouflure, proéminences, égratignent et imprime frisonnement tactile.
Au détour du chemin de gravier, poussière jaune mouillée. Au sortir des grands arbres à la sève salée, j'entre dans la clairière, espace dégagé.
Une abbaye pierres glissantes, un étang, eau douce et mer se mêlant plus loin. Plat, un vallon surplombé de collines aux arbres scintillants.
L'eau est rare, retirée, suit les mouvements des marées et de la rivière qui coule. Terre visqueuse vient léchée les berges verte d'herbe grasse.
Promenade à travers la ville, échouer au parc, à quelques pas les rives, limons et eau verte. A l'abri du grand arbre, mais agitation toujours, coin de verdure digéré par les masses lasses de l'air vicié, avide de la terre meuble aux pieds.
Feuilage densité ramifications, contraste planéité douceur du sol.
Anciennes escapades, d'il y a un an à plusieurs mois déjà. Des rencontres végétales, des éblouissements telluriques, des impressions liquides.
L'arbre de ville, îlot de vie et de couleurs dans la grisaille de béton.
L'arbre aux fées. La rugosité du tronc, le visage, les yeux, la bouche. Solide et vertical, la résistance mise en terre.
La falaise de la mer. première rencontre encrée.
Fluidité extrême, humidité chaude et vaporeuse des étangs tenant siège à l'océan et à ses effluves salines. Coin de recueillement, jouer à cache-cache dans les hautes herbes, mirer l'étendue d'eau, et l'horizon, à l'abri de toute présence, de tout regard. Voir sans être vu, protégé, espace utérin, ramifications, herbes, branches, roseaux, mousses autour des profondeurs bleutées.
Un point de vue sur l'océan, au bout d'un étroit bras de terre. Un fort à l'extrémité surplombe le Couchant, l'horizon noyé de lumière jaune une fin d'après-midi printanière. Les rocs aux aspérités rugueuses et ocres contrastent avec les énormes pierres rondes et lisses, toutes jaunes comme gorgées de l'opulence solaire. La falaise s'avance, en une lutte minérale et végétale contre l'eau, le vent et le sel.
Les épineux tiennent l'offensive du vent, avec leur aiguilles piquantes et leur écorce rugueuse en guise de glaives et de bouclier.
Première vision, dans mon sac, pas de couleurs, juste des crayons, de l'encre noire et brune. L'aveuglement est tel, bien que dans mon dos, que le noir n'est peut-être finalement pas de trop. A trop contempler le soleil, on finit par se brûler les yeux, et l'ombre, et l'obscurité, envahissent le creux des paupières.
Sorte de réécriture visuelle, comme un substrat encore conservé dans le fond de la rétine, au détour d'une synapse, assemblement d'images.
A la fois, proche et loin du réel, juste une réinvention, à partir des souvenirs, des fragments, lambeaux de perceptions, colorées par des surimpressions phantasmagoriques, transmutation.
Le moment privilégié des solitudes, les égarements solitaires du corps en marche. Du corps ébloui sous les palpitations solaires, malmené par les langueurs des fils d'Eole. Aimer se rafraîchir au bourgeonnement écumeux du royaume d'Amphitrite, et puis goûter aux vert méandres des promenades végétales, magnifiquees et nimbées de la sueur des étangs et des marécages.
Juste l'ébahissement. Etre aveugle, yeux noirs parmi les ombres. La vision recouvrée, et aors les couleurs me sont apparues, et les lignes, et les traits, et les tons, et les nuances, tout s'est composé en une symphonie muette et grandiose comme à la première aube.
Absorbée par le réel, non pas une illusion de l'esprit, un concept immatériel, mais vécu comme pure perception.
Se sentir être, appartenir, enveloppé, mieux : englobé. Etre relié, être un et mille à la fois, être toutes choses, unité et multitudes.
Une sorte d'angoisse qui m'envahit : ressentir tout, son et images, saveur de l'air, comment, mais comment enfin capter tout cela. Echouer forcément, alors essayer, tenter en vain d'en saisir une bribe. Arracher au monde, un petit bout de sa joie, de son triomphe. C'est alors que je compris, de tout mon être, corps et âme, cette citation juste et délicate de Pascal Quignard que j'avais lu, il y a peu : « C'est de l'intérieur de soi que vient la défaite. Dans le monde extérieur il n'y a pas de défaite. La nature, le ciel, la nuit, la pluie, les vents ne sont qu'un long triomphe aveugle. »
Je me souviens la promenade, le parc océanique, les arbres aux branches pieuses qui se laissaient secouées par les vents courroucés, mais le chemin ainsi se trouvait préservé et des souffles du ciel et de la présence humide de la mer. Quelques herbes hautes, un coin protégé par le sous-bois, le chemin qui passe, les feuilles des arbres étranges au feuilles disparates et argentés. Sous cet être de racines et d'écorce, l'imagination porta en moi l'image d'une petite fille qui se balancerait, la place ne manquait pas pour ce genre de jeu simple, sur une antique planche de bois.
Il y a presque 1 an, ou bien plus de 6 mois pour ces tentatives, ces affolements, reflet d'un état d'une seconde, comme d'une conscience retrouvée et égarée tout à la fois.